Entretien avec Philippe Decottignies, directeur général de Forever Living Products

Présente au Maroc depuis 2006, Forever Living Products est l’un des piliers du marketing de réseau au Maroc. Le modèle adopté par l’entreprise américaine se veut un gage de confiance aussi bien pour les distributeurs de la marque que pour les consommateurs. Retour sur les principaux points forts qui distinguent Forever dans une industrie de plus en plus exposée aux risques.

ALM : Forever Living Products a réussi à se frayer une place de choix dans le paysage de la vente directe. Sur quoi repose votre modèle commercial ?
Philippe Decottignies  : Nous sommes une entreprise américaine âgée de 45 ans. Nous avons toujours travaillé sur deux aspects, à savoir la valorisation de l’aloe vera ainsi que le multi-level marketing (Marketing multiniveau). Il s’agit d’un business-model extrêmement encadré au niveau international. Il repose sur trois éléments clés, à savoir: la protection des consommateurs, la protection du distributeur et la transparence. D’ailleurs, toutes les entreprises américaines ont l’obligation de respecter ce code international. Le cas échéant elles seront condamnables aux États-Unis pour méfaits dans un pays étranger.

Qu’en est-il de votre présence au Maroc?
Forever est présente au Maroc depuis 2006. Nous avons choisi de nous installer à Rabat pour être en contact avec les pouvoirs publics et travailler en toute transparence. D’ailleurs, la première chose que nous avons faite avant même d’ouvrir au Royaume c’est de rencontrer les responsables de différents départements ministériels et administrations publiques ainsi que des représentations diplomatiques à l’instar de l’ambassade des États-Unis à Rabat et l’ambassade du Maroc à Paris. Notre ambition a toujours été d’installer correctement la vente directe au Maroc. Pour se faire nous avons créé l’Association marocaine de la vente directe en partenariat avec des opérateurs qui était d’ores et déjà présente sur le marché marocain en l’occurrence Oriflame et Avon. L’objectif étant de normaliser et moraliser notre activité au niveau national. Depuis 2010 nous travaillons en relation étroite avec le gouvernement et les administrations pour une industrie de vente directe vertueuse. Les trois entreprises qui forment cette structure se sont alliées avec l’accord de leurs sièges internationaux pour faire en sorte qu’il n’y ait pas d’entreprises pyramidales au Maroc. Pour cela, nous avons mis en place un système pour chaque entreprise qui voulait y adhérer. Elles doivent présenter un dossier détaillé. Nous analysons en commission les produits ou les services proposés. Les entreprises validées avaient une année probatoire à l’issue de laquelle nous confirmons leur adhésion ou pas. Tout cela pour dire que nous sommes dans une industrie très carrée, très morale et extrêmement réglementée mondialement.

Comment évaluez-vous la vente directe au Maroc?
Je peux dire qu’elle s’est réellement inscrite dans le panorama économique du Maroc et s’est nettement modernisée depuis 2006. Toutes les entreprises aujourd’hui proposent des solutions en ligne permettant aux distributeurs d’acheter le produit et de pouvoir avoir toutes les informations nécessaires sur les produits et sur leurs commissions. Il y a une transparence extrêmement totale. Nous sommes passés d’un modèle où cela se passait à domicile à un modèle de plus en plus digital. C’est aussi l’un des éléments ayant apporté de la confusion. L’autre aspect au Maroc est relatif à l’installation du statut d’auto-entrepreneur. Un projet que nous avons porté auprès du ministère de l’emploi et qui a été favorablement accueilli par les pouvoirs publics. L’évolution significative de ce statut notamment l’accès à la CNSS se veut un des facteurs ayant permis de légaliser et de moderniser les relations entre les distributeurs indépendants, le marché et les clients.

Un incident fâcheux s’est produit récemment à Agadir et qui a impacté l’image du marketing de réseaux au Maroc. Comment, selon vous, peut-on contourner ce genre de situation?
Il y a eu une confusion dans l’esprit des gens entre ce que l’on appelle une chaîne de Ponzi et le Marketing multiniveau. Or ce sont deux modèles totalement différents. Dans la chaîne de Ponzi, on ne parle que d’argent ou de son équivalent en l’occurrence de l’or ou du bitcoin. Nous allons , ainsi, prétendument créer de la valeur en faisant entrer les gens dans un investissement et non pas une activité. C’est d’ailleurs ce qu’a proposé le jeune à l’origine de l’incident d’Agadir. Il n’a jamais proposé une activité d’achat, de revente ou de distribution. Il a tout simplement proposé un investissement. Donc il était sur un schéma bancaire et absolument pas sur un schéma de modèle de distribution dans lequel nous nous sommes. Soyons clair, la chaîne de Ponzi est une arnaque qui est vieille comme le monde et c’est une arnaque que tout le monde dénonce. Pour ce qui est de l’activité pyramidale, elle se distingue par trois choses. Premièrement, l’investissement initial est très élevé. D’autant plus que la personne investie sans pouvoir se faire rembourser si elle décide de stopper son activité. Il faut aussi retenir que dans une activité pyramidale par essence les gens gagnent de l’argent avec les nouveaux pas avec autre chose. Si les commissions sont payées exclusivement sur ceux qui démarrent et par la personne qui vous a fait rentrer, vous êtes dans le pyramidal. De même, les entreprises pyramidales proposent des services et non pas des produits. Ces trois critères sont reconnus mondialement.

Comment Forever se distingue-t-elle de tout cela?
Chez Forever, nous sommes conscients que toute personne qui démarre a besoin d’un coup de pouce. Et ce coup de pouce nous l’offrons en proposant un pack de démarrage à un prix raisonnable et réduit. Pour illustrer, le pack classique est à 3900 DH. Si la personne voit que cette activité ne lui convient pas, nous allons la rembourser sur les produits vendables. Dès lors, nous ne pouvons être dans le pyramidal car dans le pyramidal comme j’ai expliqué il ne peut pas y avoir de remboursement. Autre chose qui nous distingue est le fait de proposer de vrais produits, un vrai savoir-faire, de vraies usines et de véritables homologations. Nous commercialisons des produits que nous cultivons nous-même et améliorons depuis 45 ans. Le troisième élément distinctif est la relation contractuelle que nous promouvons. Il est à préciser que chaque individu est en relation juridique avec l’entreprise. C’est l’entreprise qui rend des comptes. Et le partage de commission se fait selon un modèle de calcul simple, vérifiable et totalement sécurisé. Cette commission s’établit sur le chiffre d’affaires des ventes. Autrement dit, si une personne ne développe pas sa clientèle et ne vend pas de produits, elle n’aura pas de commission. Le parrain a pour rôle de former cette personne et de la motiver. L’entreprise a également un travail d’accompagnement à faire notamment une formation totalement gratuite tant sur le produit que sur le métier. Le coût de formation que nous disposons représente près de 12 % de notre chiffre d’affaires. Une entreprise pyramidale ne va pas s’embêter à faire tout cela. Vous comprenez que nous sommes loin de ce modèle et ce n’est pas du tout la même chose.

Quel message adressez-vous aux personnes intéressées par la vente directe ?
Il faut tout d’abord s’assurer que l’entreprise fait partie de l’association marocaine de vente directe. Il faut également se méfier de toute entreprise qui leur demande de l’argent contre rien et de toute offre alléchante sur les réseaux sociaux qui ne repose pas sur une société marocaine. Il ne faut surtout pas y adhérer car c’est de l’arnaque.

Y-a-t-il des critères précis pour recruter les distributeurs ?
Nous sommes une structure de pensée américaine et donc de liberté. Il est aussi à préciser que nous ne sommes pas une industrie qui crée des milliardaires mais qui transforme la vie des gens qui s’investissent notamment en termes de formation. Notre plus grande fierté est d’avoir des distributeurs de tout le Maroc. Nous comptons parmi nos distributeurs 70 % de femmes et 30 % d’hommes. Il faut dire que le pourcentage d’hommes est supérieur à la réalité mondiale qui est de 20 %. Pour ce qui est de la moyenne d’âge, elle est d’environ 45 ans pour les femmes et 38 ans pour les hommes.

Comment vous vous positionnez sur les réseaux sociaux ?
Notre stratégie est de communiquer sur la marque, les produits et les événements que l’on organise. C’est-à-dire parler de nous en réalité. En revanche, nous ne faisons pas de prospection par contre les distributeurs peuvent le faire mais on les observe. Forever a mis en place un outil « watchdog » qui permet d’observer tout ce qui est dit autour de la marque sur les réseaux sociaux. A partir du moment où nous avons des allégations thérapeutiques ou des allégations de revenus nous sommes prévenus et nous intervenons directement auprès de nos distributeurs. Nous envoyons en premier un avertissement pour que le distributeur retire sa publication. S’il ne se manifeste pas, nous bloquons l’accès à son compte client ainsi qu’à ses commissions. Si la personne avertie n’a pas réagi face à ces deux alertes, dans ce cas notre avocat intervient juridiquement. Nous disposons également d’un service « Compliant » à Rabat pour observer ce qui est publié sur les réseaux sociaux.

Comment s’articule votre stratégie de développement dans ce contexte post-Covid ?
Elle s’opère autour d’une rationalisation des produits. Nous estimons que nous avons une gamme trop large du coup elle devient un peu confuse. De même, nous marquons notre retour sur le terrain pour renforcer la proximité avec nos distributeurs dans toutes les régions du Royaume.

Un dernier mot…
Le Maroc est un pays où la valeur humaine est très forte. Je le dis toujours : « Si vous voulez prendre une leçon d’humanité, allez au Maroc ». Cette question d’humanité je la vois en chaque occasion. Les gens se parlent, s’écoutent et se respectent. Ce réseau naturel qui existe au Maroc est le succès de notre industrie. A nous tous de la faire le plus correctement possible !